7ème édition du festival des Aïssaoua à Mila: « Les jeunes, porte-flambeaux de l’art Aissaoui »

Par Chérif Abdedaïm

Au vu du nombre croissant de ses adeptes, la tariqa aïssaouia demeure l’une des écoles mystiques les plus répandues de par le monde arabo-africain. Fondée au XVI siècle par Cheikh MOHAMED BEN AISSA (1467 / 872H- 1526 / 933H et enterré dans son mausolée de MEKNES), cette tariqa repose avant tout sur la tolérance. A l’instar des autres confréries, elle demeure après tout une école où se mêle le mystique à l’ésotérique.  Maîtres et disciples se trouvent, ainsi, en interaction soutenue dans cette immanence initiatique. Le jeune disciple est notamment accompagné, tout au long de sa quête spirituelle, jusqu’à « la réalisation de soi ». Subséquemment, et aussi évidentes soient-elles, la symbolique et l’impact de cette éducation créent un lien opératif minutieusement sectionné, des pratiques originales à leurs dérivées pour atteindre cette maîtrise de soi. Ici ce n’est plus le syllogisme qui structure le processus, mais bel et bien la logique symbolique qui prédomine. Cette logique donne son sens premier à toutes les autres pratiques cultuelles, si délirantes puissent-elles sembler ; mais aussi à d’extraordinaires oraisons jaculatoires qui se manifestent dans les états extatiques.

Outre cela, la zaouïa joue aussi son rôle comme un fait social. Elle sédimente la sacralisation du chef d’une lignée (tariqa) et entretient une hiérarchisation quasi sacerdotale vis-à-vis des descendants.

C’est ainsi que dès le début du 6ème siècle de l’Hégire, les cercles soufis se sont structurés en confréries organisées et hiérarchisées. Leur influence s’est accrue dès le 9ème siècle de l’Hégire et répandue très largement dans les couches populaires du Maghreb.

Et c’est dans cette continuité, où se côtoient l’art lyrique et les pratiques spirituelles, que cette tariqa puise son essence et attire de plus en plus de jeunes adeptes. Pourquoi donc?

D’abord parce qu’elle demeure parmi les chaînes les moins controversées. Ensuite, elle n’exige aucune motivation préparatoire et sans obligation draconienne. Enfin, elle constitue un modus opérandi permettant aux jeunes adeptes de trouvez là, une médication à travers les multiples moyens d’expression lyrique.

Sur ce point, faudrait-il, en conséquence, une brève rétrospective pour mieux comprendre la logique spirituelle des maîtres dans l’art des Aissaoui.

Suite à la chute de l’Andalousie et les fameux Ahat (anaphores symbolisant les regrets), dont témoignent les poèmes exprimant l’amertume des arabes lors de leur fuite d’Andalousie, les Ecoles de musique andalouse formées en Espagne, se sont répandues au Maghreb, amenant avec elles leurs styles et leurs répertoires lyriques.

A une thématique poétique andalouse, que les vicissitudes du temps n’ont nullement altérée, les Cheikh de la Tariqa aïssaouia ont commuté corrélativement des textes mystiques, dans le prolongement de l’éducation spirituelle, tout en conservant leur Sanâa (Air musical). Ce qui explique singulièrement la similarité modale entre les chants aïssaoui de l’Est algérien et le malouf. D’ailleurs, à l’image du cheikh Mohamed Tahar Fergani, beaucoup de ménestrels du Malouf avaient été initiés aux Sanâat chez les Khouanes (frères faisant partie d’une même confrérie).

Cela étant, le patrimoine aïssaoui a constamment constitué, et demeure, à nos jours, un terreau fertile pour les jeunes appelés présentement à être les porte-flambeaux de cet art ancestral.

Par Chérif Abdedaïm, écrivain, poète et journaliste à La Nouvelle République

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